
Le ghosting : quand le silence digital fait mal
Qui n’a jamais envoyé un message resté sans réponse ? Une simple bulle bleue qui ne s’ouvre jamais, un “vu” sans suite, ou un mail qui semble s’être perdu dans le néant. Le phénomène du ghosting, ou plus largement des non-réponses digitales, s’est imposé comme un véritable symptôme de notre époque.
D’après un sondage mené pour le livre « Je te réponds… Moi non plus » de Malene Rydahl, publié chez Flammarion, 60 % des personnes interrogées disent se sentir affectées émotionnellement lorsqu’elles n’obtiennent pas de réponse à un message personnel. Parmi elles, beaucoup parlent de blessure, d’humiliation, ou de manque de considération. Pourtant, lorsqu’on les interroge sur leurs propres non-réponses, les excuses sont souvent légères : « j’ai oublié », « j’étais occupé », ou encore « je ne savais pas quoi répondre ».
Une conséquence directe de l’hyperconnexion
Difficile de ne pas pointer du doigt le monde numérique dans lequel nous vivons. Les sollicitations s’y multiplient à une vitesse folle. Entre emails, SMS, WhatsApp, Messenger, LinkedIn, Twitter (X), ou encore les boîtes vocales, nous sommes littéralement submergés de messages chaque jour, du matin au soir. Il devient donc humainement impossible de répondre à tout.
Ce trop-plein d’informations provoque souvent un sentiment d’envahissement chez ceux qui reçoivent, et de frustration chez ceux qui attendent une réponse.
Cette tyrannie de l’instantanéité, où tout doit être traité “ASAP”, a bouleversé notre rapport à la communication. Les notifications de lecture accentuent encore ce malaise : elles rendent visibles les silences, comme une preuve que l’autre a choisi de ne pas répondre.
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Quand le ghosting devient un mode de communication
Le terme “ghosting” vient des applications de rencontre, où il décrit le fait de disparaître soudainement d’une conversation ou d’une relation, sans explication. Mais aujourd’hui, il dépasse largement le cadre sentimental. On le retrouve dans les relations amicales, professionnelles, et même familiales.
Ignorer un message est devenu une façon d’éviter le conflit, de fuir un malaise ou simplement de gagner du temps. Mais pour la personne “ghostée”, le silence agit comme une coupure nette, souvent vécue comme un rejet. D’autant plus cruel que celui ou celle qui ignore continue d’être actif sur les réseaux sociaux, donnant l’impression d’un mépris assumé.
Le besoin d’une réponse, même négative
Selon une étude du cabinet Occurrence, huit personnes sur dix préfèrent recevoir un message, même négatif, plutôt que de faire face au silence. Le non-dit laisse place à toutes les interprétations : indifférence, colère, mépris… alors qu’un simple “désolé, je ne peux pas répondre maintenant” suffirait souvent à apaiser.
Cette donnée montre à quel point le besoin de reconnaissance et de clôture émotionnelle reste essentiel, même à l’ère numérique. Le silence, lui, crée un vide qui blesse.
Et dans le monde professionnel ?
Le phénomène touche aussi le monde du travail. Entre les mails sans retour, les candidatures ignorées ou les messages laissés sans réponse sur LinkedIn, le ghosting s’est banalisé. Pourtant, chaque non-réponse fragilise la confiance et nuit à la communication interne ou externe d’une entreprise.
Alors, comment réagir face à cette avalanche de messages ?
- En posant des limites : il est normal de ne pas tout lire ni tout traiter immédiatement.
- En répondant brièvement, même par un simple accusé de réception, pour maintenir le lien.
- En désactivant certaines notifications, afin de mieux gérer la charge mentale.
- Et surtout, en restant humain dans les échanges, même digitaux.
Le ghosting et les non-réponses digitales sont devenus le miroir d’une société saturée de communication. Derrière chaque silence, il y a souvent de la fatigue, du désintérêt… ou simplement un oubli. Mais il y a aussi des émotions, parfois blessées, chez ceux qui attendent.
Et vous, comment gérez-vous ce phénomène dans votre vie personnelle et professionnelle ? Répondez-vous toujours, ou vous arrive-t-il aussi… de “ghoster” ?